Finance News Weekly : La pandémie de Covid-19 a montré à quel point il est important pour un pays d’être autonome en matière de production de vaccins. Où en est le Maroc actuellement dans ce sens ?

Abdelmadjid Belaïche : La souveraineté pharmaceutique d’un pays présuppose sa capacité à s’approvisionner régulièrement et durablement en produits pharmaceutiques, notamment en vaccins. Cela ne peut être pleinement réalisé qu’à travers la production locale de ces produits de santé afin d’éviter autant que possible notre dépendance à l’égard de pays tiers pour l’approvisionnement en vaccins, et d’éviter de devoir occasionnellement concurrencer d’autres pays. La question qui se pose aujourd’hui est : « Notre pays a-t-il atteint ses objectifs dans ce domaine » ? La réponse est : « Pas complètement, c’est toujours en cours. » Surtout quand il s’agit de vaccination Animal, deux entités nationales, à savoir le BCI, un laboratoire privé, et Biopharma, un établissement public supervisé par le ministère de l’Agriculture, sont très actives ; il n’en va pas de même pour la production de vaccins à usage humain. Et ce malgré les investissements colossaux mobilisés pour la construction de l’usine de vaccins Marbio « Ex-Sensyo » à Benslimane et le démarrage de la production « Fil & Finish » des vaccins Sinopharm par les laboratoires Sothema en 2021.

FNH : Le Maroc est-il à ce stade en passe de devenir un leader régional en matière de production de vaccins d’ici quelques années ? Et quelles mesures le Royaume doit-il encore prendre pour devenir un hub continental dans le domaine de la biotechnologie pharmaceutique ?

UN B: Les causes du retard la production de vaccins au Maroc est multiple et complexe. Tout d’abord, il faut rappeler la complexité des biotechnologies nécessaires à la production de vaccins modernes, notamment les vaccins à ARN. Ensuite, il y a le changement du contexte sanitaire mondial, avec la quasi-disparition de la pandémie de Covid-19. Cela a radicalement modifié le profil de la demande de vaccins, qui est passée d’une demande quasi exclusive de vaccins contre le Covid-19 (principalement en 2021) à un retour à une demande plus faible en volume, et surtout plus répartie entre différents types de vaccins pour les infections classiques. Ce changement dans le profil de la demande de vaccins a eu un impact négatif sur les économies d’échelle dans la production de vaccins à l’échelle mondiale. En fait le La demande de vaccins en 2021 s’est principalement concentrée sur les vaccins anti-Covid, tandis que la période post-Covid a vu un retour aux vaccins contre les infections virales ou bactériennes plus courantes.

Ce changement au niveau mondial est susceptible de freiner le désir d’investissement et de partenariats dans la production de vaccins. Cependant, nous ne devons jamais oublier que l’avenir du monde est susceptible d’engendrer de nouvelles menaces environnementales et sanitaires, ainsi que la menace de pandémies virales. Cela signifie que les investissements réalisés et les efforts déployés au Maroc ne sont pas une perte, dans la mesure où ils constituent une force offensive contre d’éventuelles futures pandémies. De même ils offrent la possibilité de se diversifier dans la production d’une gamme plus large de vaccins répondant à différents besoins d’approvisionnement. Ces investissements permettront également au Maroc de se positionner comme un véritable hub vaccinal pour notre continent, et comme le cœur de la souveraineté vaccinale du pays et de l’Afrique. Il ne faut pas oublier non plus que pour produire un vaccin, il ne suffit pas d’avoir une usine à la pointe de la technologie, bien équipée, certifiée selon les dernières normes et dotée d’un personnel qualifié. Il faudrait également disposer des autorisations nécessaires des laboratoires partenaires étrangers et de dossiers de demande d’autorisation de mise sur le marché (AMM) solides. Cela prend beaucoup de temps, sans parler du temps nécessaire à l’obtention de ces autorisations de mise sur le marché et aux contrôles des autorités en charge du secteur pharmaceutique.

FNH : Quels seraient les bénéfices économiques et sanitaires attendus pour le Maroc de ses investissements dans la production de vaccins ?

UN B: Les avantages économiques sont potentiellement énormes, mais difficiles à quantifier aujourd’hui. En cas de pandémie de grande ampleur comme celle du Covid-19, notre pays pourra atteindre rapidement une couverture vaccinale optimale pour sa population, à un coût bien inférieur aux coûts payés en 2021 pour obtenir des vaccins contre le coronavirus. Pour rappel, la facture d’importation des vaccins s’élève à près de 6 milliards de dirhams. Cela a par la suite aggravé le déficit de notre balance commerciale pharmaceutique, qui est passée de -6,8 milliards de dirhams en 2020 à -12,6 milliards de dirhams en 2021. Ces coûts très élevés sont certainement largement justifiés par les bénéfices sanitaires en termes de disponibilité et d’accès aux vaccins Covid et en termes de grand nombre de personnes vaccinées, ce qui entraîne moins de dommages humains par rapport à d’autres pays.

Or, la production locale de ces vaccins aurait permis non seulement de décongestionner notre balance commerciale pharmaceutique et de réaliser d’importantes économies de devises, mais aussi d’améliorer substantiellement nos exportations pharmaceutiques, de contribuer à notre valeur ajoutée industrielle et à notre offre d’emplois pour les jeunes. diplômés. Avec des investissements très importants dans la production de vaccins, le Maroc met enfin un pied dans le domaine des biotechnologies de haut niveau, sans oublier que la maîtrise du savoir-faire biopharmaceutique permettra ensuite de passer à d’autres produits à haute valeur économique et ajoutée. valeur. comme les anticorps monoclonaux utilisés dans le traitement du cancer et d’autres maladies chroniques. Cela permettra également de réaliser d’importantes économies sur les médicaments, qui sont aujourd’hui parmi les plus chers.



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